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Odile Griver

Impressions de lecture : La Tolérance pervertie de Raymond Massé





 


Impressions de lecture : La Tolérance pervertie

de Raymond Massé




Tolérance ! en voilà un mot galvaudé ! et voilà une notion régulièrement convoquée surtout pour dénoncer les « intolérants », c’est-à-dire tous ceux qui, de manière réactionnaire, ne supportent pas ce qui sort du cadre, ce qui dépasse, ce qui n’est pas strictement conforme à un standard. C’est même une valeur inscrite dans nos Constitutions, article 1


Tout Franc-maçon est un être libre qui ne relève que de sa conscience .


En outre, la déclaration de principes de bien des obédiences proclame son indéfectible attachement aux principes de liberté, de tolérance, de laïcité, de respect des autres et de soi-même .


Mais à y regarder de plus près, et comme beaucoup de mots renvoyant à des valeurs, comme liberté, égalité etc.., on ne sait pas bien ce que cette « valeur » recouvre.


Raymond Massé est un anthropologue reconnu (il a même été le directeur du département d’anthropologie de l’Université de Laval (Québec)), spécialiste en anthropologie de la santé, thème sur lequel il a produit plusieurs études notamment au regard des thérapeutiques religieuses et sacrées dans les sociétés traditionnelles des Antilles françaises et anglaises.

Son livre est donc très précieux pour réfléchir à nouveau à un concept qui semblait « aller de soi « en franc-maçonnerie.


Alors c’est quoi la tolérance ? Nous n’avons jamais été, autant qu’aujourd’hui, « bombardés » de demandes de tolérance, de la part de minorités qui, toutes ou presque, en appellent à la tolérance de la majorité, sans aucunement prendre en charge la réciprocité de l’engagement demandé.


Raymond Massé, à la suite de Paul Ricoeur, distingue des valeurs très différentes de la tolérance selon que :

- On supporte stoïquement ce qui n’est pas choisi.

- On cherche à comprendre ce qu’on ne connait pas.

- On respecte ce qu’on désapprouve au nom de la liberté de chacun.

- On est indifférent à ce qu’on ne peut pas comprendre.

- On est d’accord du moment que l’autre ne nous nuit pas.


Il se trouve qu’aujourd’hui, il nous est demandé non seulement d’approuver les différences, mais, de plus, de dénoncer l’intolérance. Et là, un pas est franchi qui dépasse le concept de tolérance. Car tolérer ce n’est pas accepter, ce n’est pas entrer dans le respect inconditionnel (presque la vénération) de l’autre, et d’ailleurs ce n’est pas non plus l’indifférence.


Doit-on tout tolérer ?


Tout tolérer, inconditionnellement, ne peut-il pas conduire à saper les bases même de la tolérance ?

Le respect inconditionnel, outre qu’il peut vite devenir dangereux s’agissant de pratiques contraires aux lois, conduit également au double standard de la morale : ce qui n’est pas admis dans mon pays, je le respecte, au nom des traditions, de la bienveillance vis-à-vis d’autres cultures, donc au titre du relativisme culturel. Ainsi en va-t-il de l’excision par exemple, du mariage polygamique, de la torture, etc…Cette attitude est véritablement non humaniste et la tolérance serait alors très destructrice. Il faut donc se résoudre à accepter des limites à la tolérance.


Pour tolérer faut-il d’abord chercher à comprendre ?


Chercher à comprendre est une attitude plus constructive mais cela ne veut pas dire ne pas juger. Par exemple, on peut comprendre peut-être l’enchainement des causes qui ont conduit à ce qu’une personne devienne un violeur, un maltraitant ou même un nazi (voir Hanna Arendt). En aucune façon, compréhension se traduit par acceptation, ni même abstention du jugement.


Faut il admettre toutes les différences ?


Est-il possible, au nom des traditions, d’admettre toutes les différences ? Non, évidemment, car qui décide des traditions ? Quels intérêts servent-elles ? Que justifient-elles ? Les traditions, comme toutes les coutumes humaines, évoluent et si elles conduisent à la coercition, si elles ont des conséquences négatives, si elles sont inscrites dans des sociétés oppressives, ne doivent pas non plus être respectées.


En résumé,:

La tolérance n’est pas une position théorique, contemplative, abstraite ; elle doit déboucher sur l’action.

Une société tolérante est une société mosaïque dont la cohésion repose sur un liant qui cimente les multiples pièces de formes et de couleurs différentes. Ce ciment, ce sont les valeurs communes découlant de discussions démocratiques et ouvertes


UNE TOLERANCE CONDITIONNELLE

- Tolérance et relativisme


Le relativisme doit être considéré comme un prérequis à la tolérance. Comment tolérer les croyances et les pratiques qui en découlent si on est persuadé que seules les nôtres sont fondées, défendables et acceptables ? Toutefois, le relativisme n’est pas une condition suffisante. Dans ses formes les plus radicales, il peut même alimenter l’intolérance. Croire que tout est acceptable, même les pratiques injustes, discriminatoires, inhumaines, qui ne respectent pas la dignité de tout humain, peut conduire à des dérapages destructeurs.


Le relativisme postule de l’égale valeur des cultures. Certes aucun jugement de valeur ne peut être porté sur une pratique sociale donnée avant une analyse sérieuse, complète et sans préjugés, des conditions de vie et du contexte (social, historique, culturel, politique) dans lesquels cette pratique sociale s’inscrit. Un relativisme culturel correctement compris se définira comme une ouverture à regarder l’Autre avec un esprit ouvert, à replacer ses croyances et ses pratiques en contexte. Ce relativisme méthodologique n’interdit pas de juger. Il interdit tout jugement a priori, avant une analyse ouverte et rigoureuse. Par exemple, très bien « comprendre » les facteurs explicatifs, le contexte sociopolitique et les causes des débordements de l’Allemagne nazie ne suffit pas pour accepter l’élimination des Juifs, des Polonais, des homosexuels ou des déficients mentaux qui en a résulté.


Le relativisme soutient à raison que l’on ne peut juger des valeurs et des pratiques des Autres du fait qu’elles prennent tout leur sens une fois replacées dans leur propre cadre socioculturel de référence.


Par exemple, dans quelle mesure peut-on porter des jugements sur les pratiques des civilisations anciennes (ex. : sumériennes, grecques, romaines) qui vivaient dans un univers social, politique et moral totalement étranger au monde contemporain.


Il est important de respecter les traditions : Or, le respect des traditions doit aussi tenir compte des rapports sociaux asymétriques existant au sein de toute société. Trop souvent, il masque les rapports de pouvoir et les injustices, et de plus les traditions ne sont pas immuables. Certaines pratiques traditionnelles sont dommageables, même malveillantes, d’autres sont bénéfiques et d’autres sont éthiquement neutres.



Y a-t-il ou pas des Valeurs Universelles ?


Bien entendu, la controverse s’établira, comme il est d’usage aujourd’hui, sur les « valeurs » universelles, considérées comme des valeurs occidentales et donc….colonialistes !


Mais justement, à les regarder de près , ces « valeurs » ne sont pas différentes d’une culture à l’autre, d’une religion à l’autre, et même d’un pays à l’autre. Que sont-elles ? La solidarité, l’entraide, la responsabilité de nos actes, le souci d’une forme de justice, le respect de la vie humaine, voire le respect de l’autonomie de la personne, ne sont pas totalement absentes dans certaines cultures, et on peut considérer qu’elles sont inscrites au cœur de l’humanité. Mais même « si l’on observait que l’égalité, la liberté individuelle ou le respect de la dignité ne sont pas présentes partout, ces valeurs s’en trouveraient-elles automatiquement disqualifiées pour considérer comme intolérables les pratiques qui les bafouent ? ». Il faut rappeler que l’adhésion à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme est absolument volontaire, et n’a qu’une valeur déclarative sans aucune sanction. 190 pays l’ont signée !


Il faudrait d’ailleurs ajouter à ces « droits humains fondamentaux », comme certains analystes l’ont fait remarquer, des « capabilités » c’est-à-dire des conditions pour que « chacun puisse disposer de la liberté, des outils et des compétences pour poursuivre des finalités qui sont représentatives de sa propre conception d’une vie satisfaisante ». « Ces compétences englobent les compétences personnelles, bien sûr (traits de personnalité, compétences intellectuelles ou émotionnelles, habiletés de perception ou de mouvement) mais, tout autant, l’accès à un environnement social, politique et économique favorisant l’expression de cette liberté. »


Le cosmopolitisme et la tolérance


L’horizon vers lequel tend la tolérance d’inspiration multiculturaliste n’est plus celui de la construction d’une nation qui accepte l’altérité tout en faisant la promotion d’une vision commune du bon, du bien, du juste et du tolérable. Il devient celui de citoyens du monde, tous égaux dans leur contribution respective à la diversité : c’est ce qu’on appelle le cosmopolitisme. Dans sa forme radicale, elle fait la promotion d’un ordre politique mondial et suppose une disparition plus ou moins complète des États-nations. Tout comme le relativisme, ce cosmopolitisme suppose une attitude d’ouverture à la différence, des aptitudes à la communication interculturelle et un idéal de solidarité universelle qui transcendent les barrières ethnoculturelles.


Mais dès lors pour quelles fins tolérer ? Le projet cosmopolitiste est-il l’antidote à la fragmentation effrénée des identités ? Faut il tolérer simplement pour la promotion des diversités en elles-mêmes ? Pour un avenir post-multiculturaliste rayonnant, fait de minorités cohabitant dans des sociétés « purement » pluralistes qui auront su transcender les rapports minoritaires-majoritaires ? Ou pour espérer voir un jour s’effacer ces diversités en encourageant l’humain au dépassement cosmopolitiste des frontières identitaires par ces nouveaux citoyens du monde ? Enfin, ce cosmopolitisme contribue-t-il à un projet de société rassembleur reposant sur des valeurs humanistes désormais partagées ?


Il se trouve que les idéaux cosmopolitistes doivent plutôt composer aujourd’hui avec le renforcement des frontières et la multiplication des « murs » séparant un nombre croissant de pays. (on n’a jamais vu autant de murs s’édifier partout) . En outre, cet idéal a déjà été porté et le résultat constaté c’est qu’ aucune paix universelle n’a jamais découlé mécaniquement et automatiquement du dépassement des États.


Les croyances religieuses et la tolérance


Le respect des croyances religieuses fut de tout temps l’un des lieux privilégiés de mise à l’épreuve de la tolérance.


Sauf exception d’une infime minorité de citoyens, tous reconnaissent le droit de chacun de croire ce qu’il veut, tant dans le champ du religieux que dans celui des croyances laïques les plus saugrenues et fantaisistes (ex. : horoscopes, pouvoir des chakras et des auras, formes de vie extraterrestres, théories des complots, sorcelleries, néochamanismes). L’humanité, semble-t-il, doit faire son deuil de l’espoir cultivé depuis le siècle des Lumières d’une population qui soit majoritairement guidée par la seule rationalité, les acquis de la science et la pensée critique. Toute entrave au droit de croire ce que l’on veut ne peut être justifiée ni sur le plan éthique ni sur le plan politique.


Or, croire en l’existence d’extraterrestres, en la réincarnation, en la vie après la mort, ou croire que le monde fut créé en sept jours ou encore que la Terre soit plate ne porte pas à conséquence sur le vivre-ensemble. Il en va cependant tout autrement si l’on croit que vacciner va à l’encontre des destins voulus par Dieu et qu’il vaut mieux s’en remettre à la prière, que l’éducation des enfants à la sexualité à l’école risque de les pervertir, que le droit à l’avortement doit être subordonné à la volonté divine ou que les changements climatiques n’existent pas autrement que voulus par Dieu ; ces croyances sont porteuses de graves conséquences pour les individus vulnérables et la collectivité.


Le droit à la liberté de croyance garanti par les Constitutions et les lois atteint ses limites lorsqu’il conduit à tolérer des attitudes et des pratiques susceptibles de mener à des atteintes à d’autres droits de la personne ou à la protection de la planète.


Nous avons même le devoir de dénoncer ces croyances lorsqu’elles militent pour imposer leurs propres normes à l’ensemble de la société. Le cas des mouvements pro-vie illustre parfaitement la gravité des impacts de cette « liberté » religieuse ; il œuvre non pas au libre choix de poursuivre une grossesse indésirée mais plutôt, dans une intolérance totalitaire et radicale, à l’abolition du droit à l’avortement pour l’ensemble des femmes, croyantes ou non. Le droit de croire ne peut devenir un droit de convertir par la force.


Une confusion regrettable


Les définitions habituelles de la religion mettent sur un pied d’égalité les croyances et les pratiques. Liberté de conscience et liberté de pratiques sociales sont paresseusement confondues, croyances et pratiques semblant indissociables.


Les croyances religieuses ne peuvent donc pas, automatiquement, justifier le non-respect des normes partagées librement et démocratiquement dans une société donnée. Si la liberté de conscience va, bien sûr, de pair avec le droit de pratiquer la religion de son choix, elle doit exclure le droit d’imposer sa conscience aux autres.


L’Etat ne peut pas être neutre, l’Etat ne peut pas se laver les mains des pratiques de certaines croyances qui viseraient par exemple à exciser les filles, à ne pas les envoyer à l’école , à leur refuser IVG et contraception si cela est autorisé. Postuler la neutralité de l’État en matière de valeurs implique une abdication face à ses responsabilités éthiques.


Un État laïque doit protéger les droits des citoyens en tant que citoyens et non en tant que croyants ou non-croyants, tout comme la justice est un devoir qui dépasse celui des seules âmes charitables


Nous vivons dans des sociétés pluralistes fondamentalement schizophrènes. D’un côté, nos systèmes juridiques sont fondés sur des arguments de « preuves empiriques hors de tout doute raisonnable », nos systèmes de santé refusent de soutenir des pratiques de soins non confirmées par la science, ou autoriser la distribution de médicaments non homologués par une recherche rigoureuse, bref ils reposent sur la science et la raison. De l’autre côté, les croyances religieuses soustraites à toute vérification ou validation au regard de toute science, de toute rationalité, même si elles sont à la base de pratiques dommageables pour la cohésion sociale et le vivre-ensemble, sont consacrées intouchables, exemptes de toute exigence logique et scientifique, et protégées par des Constitutions.


La réciprocité


La reconnaissance d’une dose de discrimination (sociale, religieuse, économique) d’une minorité donnée confirme-t-elle un droit à la non-réciprocité dans la tolérance ?


Donc réciproquement si chacun peut librement croire en ce qu’il souhaite, nous pouvons juger ces croyances comme farfelues ou hérétiques, car tant que ces jugements ne se traduisent pas en actes, ils ne relèvent que de la liberté d’opinion. C’est ce qu’on nomme parfois le droit au blasphème.


La tolérance s’impose comme valeur incontournable dans les sociétés pluralistes modernes. Au vu des exactions des régimes fascistes, dictatoriaux ou communistes autoritaires du xxe siècle contre leurs minorités, face aux quêtes de reconnaissance militantes des communautarismes ethnoculturels, on ne peut que reconnaître l’importance stratégique de cette valeur en tant que ciment d’un vivre-ensemble harmonieux.

Conclusion :

La tolérance ne peut se satisfaire d’être abdication, neutralité, indifférence, relativisme paralysant ou pire, simple déférence envers la culture de l’Autre. Tout ne mérite pas d’être toléré, surtout lorsque la tolérance implique l’acceptation d’empiétements sur des droits fondamentaux.


La tolérance passe obligatoirement par la liberté de croyance et de pratique religieuse.


Mais elle passe aussi par une critique des discours victimaires et des hystéries de l’indignation alimentés par des militants bien intentionnés de la tolérance. Le dogmatisme les confine à une culpabilisation généralisée des intolérants, groupe informe qui amalgame en fait tous ceux qui réfléchissent aux limites et aux conditions du respect de l’Autre. La culture de l’éveil et du bannissement qui sévit dans le monde d’aujourd’hui est marquée par une inflation des émotions, des sensibilités exacerbées autorisant des groupuscules militants à adopter des attitudes et des pratiques proprement intolérantes face à ceux qui seront accusés d’appropriation culturelle, de racisme, de sexisme. L’ouverture à l’Autre ne peut faire l’économie d’une tolérance engagée dans la promotion de valeurs et de normes définissant les conditions et les limites d’un vivre-ensemble harmonieux.


Nous sommes dans un monde rempli de personnes qui sont convaincues d’avoir raison. Et pourtant, au-delà des certitudes affirmées des uns et des autres, jamais le « courage de la nuance2 » n’aura-t-il eu autant d’importance. Or, il est aujourd’hui beaucoup plus facile d’être dogmatique que nuancé

Il faudra bien s’attacher, pour vivre ensemble en harmonie, à des valeurs universelles issues d’un consensus obtenu après une discussion ouverte, démocratique et éthique. « Ce sont ces valeurs universelles partagées et leur mobilisation pour le bien commun qui deviennent le véritable horizon d’un humanisme respectueux des Autres. Le défi sera de mettre l’accent moins sur ce qui nous distingue que sur ce que nous avons tous en partage en tant qu’humains. »


Ce but ne peut être atteint qu’à condition qu’un projet de société, garantissant la liberté de tous, et reposant sur une tolérance humaniste et émancipatrice, soit discuté sans dogmatisme entre tous les membres de la société et traversant les identités communautaires, ethniques, religieuses, sexuelles pour mettre l’humain au cœur d’un pluralisme raisonnable.

Odile Grisver


 

Impresiones de lectura

Tolerancia pervertida por Raymond Massé,



Tolerancia! ¡Es una palabra demasiado usada! Y es una noción que se utiliza regularmente para denunciar a los "intolerantes", es decir, a todos aquellos que, de forma reaccionaria, no soportan nada que esté fuera de lugar, que vaya más allá, que no se ajuste estrictamente a una norma. Es incluso un valor consagrado en nuestras Constituciones, artículo 1.


Cada francmasón es un ser libre que sólo responde ante su conciencia.


Además, la declaración de principios de muchas obediencias proclama su adhesión inquebrantable a los principios de libertad, tolerancia, laicismo y respeto a los demás y a uno mismo.


Pero si se examina más de cerca, y al igual que muchas palabras que se refieren a valores como libertad, igualdad, etc., no está claro qué abarca este "valor".


Raymond Massé es un reputado antropólogo (fue incluso director del departamento de antropología de la Universidad Laval de Quebec), especializado en antropología de la salud, tema sobre el que ha realizado varios estudios, en particular sobre la terapéutica religiosa y sagrada en las sociedades tradicionales de las Antillas francesas e inglesas.


Su libro es una contribución inestimable al replanteamiento de un concepto que parecía "darse por sentado" en la masonería.


¿Qué es la tolerancia? Nunca antes habíamos sido tan "bombardeados" como hoy con peticiones de tolerancia por parte de minorías, casi todas las cuales apelan a la tolerancia de la mayoría, sin responsabilizarse en absoluto de la reciprocidad del compromiso solicitado.


Raymond Massé, siguiendo a Paul Ricoeur, distingue valores de tolerancia muy diferentes según :

- Soportamos estoicamente lo que no hemos elegido.

- Intentamos comprender lo que no conocemos.

- Respetamos lo que desaprobamos en nombre de la libertad individual.

- Somos indiferentes a lo que no podemos comprender.

- Estamos de acuerdo mientras el otro no nos perjudique.


Sucede que hoy se nos pide no sólo que aprobemos las diferencias, sino también que denunciemos la intolerancia. Y eso es un paso más allá del concepto de tolerancia. La tolerancia no es aceptación, no es respeto incondicional (casi veneración) por los demás, ni tampoco indiferencia.



¿Debemos tolerarlo todo?


¿Tolerarlo todo, incondicionalmente, no puede llevar a socavar los fundamentos mismos de la tolerancia?


El respeto incondicional, aparte de que puede volverse rápidamente peligroso cuando se trata de prácticas contrarias a la ley, conduce también a un doble rasero moral: lo que no se acepta en mi país, yo lo respeto, en nombre de la tradición, de la benevolencia hacia otras culturas, por tanto en nombre del relativismo cultural. Lo mismo ocurre, por ejemplo, con la escisión, el matrimonio polígamo, la tortura, etc. Esta actitud es verdaderamente no humanista y la tolerancia sería muy destructiva. Por tanto, debemos aceptar que la tolerancia tiene límites.


Para tolerar, ¿hay que tratar primero de comprender?


Buscar comprender es una actitud más constructiva, pero no significa no juzgar. Por ejemplo, tal vez podamos comprender la cadena de causas que llevaron a una persona a convertirse en violador, maltratador o incluso nazi (véase Hanna Arendt). Comprender no se traduce en ningún caso en aceptar, ni siquiera en abstenerse de juzgar.

¿Tenemos que aceptar todas las diferencias?


¿Es posible, en nombre de la tradición, aceptar todas las diferencias? Evidentemente no, porque ¿quién decide qué son las tradiciones? ¿A qué intereses sirven? ¿Qué justifican? Las tradiciones, como todas las costumbres humanas, evolucionan y si conducen a la coacción, si tienen consecuencias negativas, si forman parte de sociedades opresivas, tampoco deben respetarse.

Resumiendo:


La tolerancia no es una postura teórica, contemplativa y abstracta; debe llevar a la acción.

Una sociedad tolerante es una sociedad mosaico cuya cohesión se basa en un aglutinante que mantiene unidas las numerosas piezas de diferentes formas y colores. Este aglutinante son los valores compartidos que surgen del debate democrático y abierto.


TOLERANCIA CONDICIONAL



- Tolerancia y relativismo


El relativismo debe considerarse un requisito previo para la tolerancia. ¿Cómo podemos tolerar las creencias y las prácticas que se derivan de ellas si estamos convencidos de que sólo las nuestras están bien fundadas, son defendibles y aceptables? Sin embargo, el relativismo no es una condición suficiente. En sus formas más radicales, puede incluso alimentar la intolerancia. Creer que todo es aceptable, incluso las prácticas injustas, discriminatorias e inhumanas que no respetan la dignidad de todo ser humano, puede conducir a excesos destructivos.


El relativismo postula la igualdad de valor de las culturas. Por supuesto, no se puede emitir ningún juicio de valor sobre una práctica social determinada antes de realizar un análisis serio, completo y desprejuiciado de las condiciones de vida y del contexto (social, histórico, cultural, político) en el que se inscribe esa práctica social. El relativismo cultural, correctamente entendido, se define como la apertura a mirar al Otro con una mente abierta, a poner en contexto creencias y prácticas. Este relativismo metodológico no excluye el juicio. Prohíbe cualquier juicio a priori, previo a un análisis abierto y riguroso. Por ejemplo, "comprender" muy bien los factores explicativos, el contexto sociopolítico y las causas de los excesos de la Alemania nazi no basta para aceptar la consiguiente eliminación de judíos, polacos, homosexuales o deficientes mentales.


El relativismo sostiene, con razón, que no podemos juzgar los valores y las prácticas de los demás a partir del hecho de que adquieren todo su sentido una vez situados en su propio marco sociocultural de referencia.


Por ejemplo, ¿hasta qué punto podemos emitir juicios sobre las prácticas de civilizaciones antiguas (como la sumeria, la griega o la romana) que vivían en un universo social, político y moral totalmente ajeno al mundo contemporáneo?


Es importante respetar las tradiciones: Pero el respeto a las tradiciones también debe tener en cuenta las relaciones sociales asimétricas que existen en cualquier sociedad. Con demasiada frecuencia, oculta relaciones de poder e injusticias, y las tradiciones no son inmutables. Algunas prácticas tradicionales son perjudiciales, incluso maliciosas, otras son beneficiosas y otras son éticamente neutras.



¿Existen o no Valores Universales?


Por supuesto, la polémica se centrará, como es habitual hoy en día, en los "valores" universales, que se consideran valores occidentales y, por tanto, ¡....colonialistas!


Pero si se examinan más de cerca, estos "valores" no difieren de una cultura a otra, de una religión a otra, e incluso de un país a otro. ¿Cuáles son? La solidaridad, la ayuda mutua, la responsabilidad de nuestros actos, la preocupación por una forma de justicia, el respeto de la vida humana e incluso el respeto de la autonomía del individuo no están totalmente ausentes de ciertas culturas, y podemos considerar que están inscritos en el corazón de la humanidad. Pero incluso "si observáramos que la igualdad, la libertad individual o el respeto de la dignidad no están presentes en todas partes, ¿se descalificarían automáticamente estos valores para considerar intolerables las prácticas que los desprecian? Hay que recordar que la adhesión a la Declaración Universal de los Derechos Humanos es absolutamente voluntaria, y sólo tiene un valor declarativo sin sanción alguna. ¡190 países la han firmado!


A estos "derechos humanos fundamentales", como han señalado algunos analistas, hay que añadir las "capacidades", es decir, las condiciones en las que "toda persona puede disponer de la libertad, las herramientas y las aptitudes necesarias para perseguir objetivos representativos de su propia concepción de una vida satisfactoria". "Estas capacidades incluyen, por supuesto, aptitudes personales (rasgos de personalidad, aptitudes intelectuales o emocionales, aptitudes de percepción o de movimiento), pero tanto como el acceso a un entorno social, político y económico que favorezca la expresión de esta libertad".


Cosmopolitismo y tolerancia


El horizonte hacia el que tiende la tolerancia inspirada en el multiculturalismo ya no es el de la construcción de una nación que acepta la alteridad al tiempo que promueve una visión común de lo que es bueno, correcto, justo y tolerable. Se convierte en el de ciudadanos del mundo, todos iguales en sus respectivas contribuciones a la diversidad: es lo que se conoce como cosmopolitismo. En su forma radical, promueve un orden político mundial y presupone la desaparición más o menos completa de los Estados-nación. Al igual que el relativismo, este cosmopolitismo presupone una actitud de apertura a la diferencia, una capacidad de comunicación intercultural y un ideal de solidaridad universal que trasciende las barreras etnoculturales.


Pero, ¿para qué sirve la tolerancia? ¿Es el proyecto cosmopolita el antídoto contra la fragmentación desenfrenada de las identidades? ¿Debemos tolerar simplemente para promover la diversidad en sí misma? ¿Por el bien de un radiante futuro posmulticulturalista, con minorías que conviven en sociedades "puramente" pluralistas que trascienden las relaciones minoría-mayoría? ¿O por la esperanza de que un día estas diversidades se desvanezcan animando a estos nuevos ciudadanos del mundo a trascender las fronteras de sus identidades de forma cosmopolita? Por último, ¿contribuye este cosmopolitismo a un proyecto unificador de la sociedad basado en valores humanistas compartidos?


Resulta que los ideales cosmopolitas tienen que enfrentarse hoy en día al refuerzo de las fronteras y a la proliferación de "muros" que separan a un número creciente de países. (Nunca habíamos visto construir tantos muros por todas partes). Es más, este ideal ya se ha alcanzado, y el resultado es que ninguna paz universal ha fluido nunca de forma mecánica y automática de la superación de los Estados.


Creencias religiosas y tolerancia


El respeto de las creencias religiosas ha sido siempre uno de los mejores lugares para poner a prueba la tolerancia.


Con la excepción de una ínfima minoría de ciudadanos, todo el mundo reconoce el derecho de cada cual a creer lo que quiera, tanto en el ámbito de la religión como en el de las creencias laicas más extrañas y fantasiosas (por ejemplo, los horóscopos, el poder de los chakras y las auras, las formas de vida extraterrestre, las teorías de la conspiración, la brujería, el neochamanismo). La humanidad, al parecer, debe aceptar la esperanza cultivada desde el Siglo de las Luces de una población guiada en su mayor parte únicamente por la racionalidad, los logros de la ciencia y el pensamiento crítico. Cualquier restricción del derecho a creer lo que queramos no puede justificarse ni ética ni políticamente.

Creer en la existencia de extraterrestres, en la reencarnación, en la vida después de la muerte, en que el mundo se creó en siete días o en que la Tierra es plana no tiene ninguna consecuencia para la convivencia. Sin embargo, no se puede decir lo mismo de la creencia de que la vacunación va en contra de la voluntad de Dios y que es mejor confiar en la oración, o que enseñar sexualidad a los niños en la escuela corre el riesgo de pervertirlos, o que el derecho al aborto debe subordinarse a la voluntad de Dios, o que el cambio climático no existe a menos que sea la voluntad de Dios; estas creencias tienen graves consecuencias para las personas vulnerables y la sociedad en su conjunto.


El derecho a la libertad de creencia garantizado por las constituciones y las leyes alcanza sus límites cuando conduce a la tolerancia de actitudes y prácticas que pueden llevar a la vulneración de otros derechos humanos o a la protección del planeta.


Incluso tenemos el deber de denunciar esas creencias cuando militan para imponer sus propias normas al conjunto de la sociedad. El caso de los movimientos provida ilustra perfectamente la gravedad del impacto de esta "libertad" religiosa; no trabajan por la libre elección de continuar un embarazo no deseado, sino, con intolerancia totalitaria y radical, por la abolición del derecho al aborto para todas las mujeres, crean o no en él. El derecho a creer no puede convertirse en un derecho a convertirse por la fuerza.


Lamentable confusión


Las definiciones habituales de religión equiparan creencias y prácticas. La libertad de conciencia y la libertad de práctica social se confunden perezosamente, con creencias y prácticas aparentemente indistinguibles.


Por tanto, las creencias religiosas no pueden justificar automáticamente el incumplimiento de las normas libre y democráticamente compartidas de una sociedad determinada. Aunque la libertad de conciencia va naturalmente de la mano del derecho a practicar la religión que uno elija, debe excluir el derecho a imponer la propia conciencia a los demás.


El Estado no puede ser neutral, el Estado no puede lavarse las manos ante las prácticas de ciertas creencias que tendrían como objetivo, por ejemplo, extirpar a las niñas, no enviarlas a la escuela, negarles el aborto y la contracepción si esto está autorizado. Postular la neutralidad del Estado en materia de valores implica abdicar de sus responsabilidades éticas.


Un Estado laico debe proteger los derechos de sus ciudadanos como ciudadanos y no como creyentes o no creyentes, del mismo modo que la justicia es un deber que va más allá del de las almas caritativas.


Vivimos en sociedades pluralistas que son fundamentalmente esquizofrénicas. Por un lado, nuestros sistemas jurídicos se basan en argumentos de "evidencia empírica más allá de toda duda razonable", nuestros sistemas sanitarios se niegan a apoyar prácticas sanitarias que no hayan sido confirmadas por la ciencia, o a autorizar la distribución de medicamentos que no hayan sido aprobados por una investigación rigurosa; en resumen, se basan en la ciencia y la razón. En cambio, las creencias religiosas exentas de toda verificación o validación a la luz de la ciencia o la racionalidad, incluso si subyacen a prácticas perjudiciales para la cohesión social y la convivencia, están consagradas como intocables, exentas de toda exigencia lógica o científica, y protegidas por las constituciones.


Reciprocidad


¿El reconocimiento de un grado de discriminación (social, religiosa, económica) contra una minoría determinada confirma el derecho a la no reciprocidad en la tolerancia?


Así, por el contrario, si cada uno es libre de creer en lo que quiera, podemos juzgar estas creencias como excéntricas o heréticas, porque mientras estos juicios no se traduzcan en hechos, sólo entran en el ámbito de la libertad de opinión. A veces se habla de derecho a la blasfemia.


La tolerancia es un valor esencial en las sociedades pluralistas modernas. A la vista de las atrocidades perpetradas por regímenes fascistas, dictatoriales o comunistas autoritarios en el siglo XX contra sus minorías, y de la búsqueda militante de reconocimiento por parte de las comunidades etnoculturales, no podemos sino reconocer la importancia estratégica de este valor como cemento de una convivencia armoniosa.



Conclusión:


La tolerancia no puede contentarse con la abdicación, la neutralidad, la indiferencia, el relativismo paralizante o, peor aún, la simple deferencia hacia la cultura del Otro. No todo merece ser tolerado, sobre todo cuando la tolerancia implica aceptar cercenamientos de derechos fundamentales.

La tolerancia exige libertad de creencia y práctica religiosa.


Pero también supone una crítica del discurso victimista y de la histeria de indignación alimentada por los bienintencionados defensores de la tolerancia. El dogmatismo les confina a una culpabilización generalizada de los intolerantes, grupo informe que en realidad amalgama a todos los que reflexionan sobre los límites y las condiciones del respeto del Otro. La cultura del despertar y del destierro que impera en el mundo actual está marcada por una inflación de emociones y de sensibilidades exacerbadas, que autoriza a los grupos militantes a adoptar actitudes y prácticas francamente intolerantes frente a los acusados de apropiación cultural, racismo o sexismo. La apertura al Otro no puede lograrse sin una tolerancia comprometida con la promoción de valores y normas que definan las condiciones y los límites de una convivencia armoniosa.


Vivimos en un mundo lleno de personas convencidas de que tienen razón. Y sin embargo, por encima de las certezas que afirman algunos, el "valor del matiz "2 nunca ha sido tan importante. Sin embargo, hoy en día es mucho más fácil ser dogmático que matizar.

Si queremos vivir juntos en armonía, tendremos que comprometernos con valores universales derivados de un consenso alcanzado tras un debate abierto, democrático y ético. "Son estos valores universales compartidos y su movilización por el bien común los que se convierten en el verdadero horizonte de un humanismo respetuoso con los demás. El reto será centrarnos menos en lo que nos diferencia y más en lo que todos compartimos como seres humanos".


Este objetivo sólo podrá alcanzarse si una visión de la sociedad, garante de la libertad de todos y basada en la tolerancia humanista y emancipadora, se debate sin dogmatismos entre todos los miembros de la sociedad, atravesando las identidades comunitarias, étnicas, religiosas y sexuales para situar al ser humano en el centro de un pluralismo razonable.


Odile Grisver


 


Reading impressions

Perverted Tolerance by Raymond Massé,


Tolerance is an overused word, and a notion that is regularly used to denounce the "intolerant", i.e. all those who, in a reactionary way, cannot stand anything that is out of place, that goes beyond, that does not strictly conform to a standard. It's even a value enshrined in our Constitutions, Article 1.


Every Freemason is a free being who is answerable only to his conscience.


Moreover, the declaration of principles of many obediences proclaims their unwavering attachment to the principles of freedom, tolerance, secularism, respect for others and for oneself.


But on closer inspection, and like many words referring to values, such as liberty, equality etc., it's not clear what this "value" covers.


Raymond Massé is a renowned anthropologist (he was even Director of the Anthropology Department at Laval University, Quebec), specializing in the anthropology of health, a theme on which he has produced several studies, notably on religious and sacred therapeutics in traditional societies of the French and English West Indies.


His book is therefore invaluable for rethinking a concept that seemed to be "taken for granted" in Freemasonry.


So what is tolerance? Never before have we been as "bombarded" as we are today with requests for tolerance, from minorities who, all or almost all, appeal to the tolerance of the majority, without taking any responsibility for the reciprocity of the commitment requested.


Following in Paul Ricoeur's footsteps, Raymond Massé distinguishes between very different values of tolerance:

- We stoically put up with what is not chosen.

- We try to understand what we don't know.

- We respect what we disapprove of in the name of individual freedom.

- We are indifferent to what we cannot understand.

- We agree as long as the other does not harm us.


It so happens that today, we are asked not only to approve of differences, but also to denounce intolerance. And that's a step beyond the concept of tolerance. For tolerance is not acceptance, it is not unconditional respect (almost veneration) of the other, nor is it indifference.



Should we tolerate everything?


Doesn't tolerating everything, unconditionally, undermine the very foundations of tolerance?


Unconditional respect, apart from the fact that it can quickly become dangerous when it comes to practices that run counter to the law, also leads to the double standard of morality: what is not accepted in my country, I respect, in the name of tradition, of benevolence towards other cultures, and therefore in the name of cultural relativism. This is the case, for example, with excision, polygamous marriage, torture, etc. This attitude is truly non-humanist, and tolerance would be very destructive. We must therefore accept that there are limits to tolerance.


In order to tolerate, must we first seek to understand?


Seeking to understand is a more constructive attitude, but it doesn't mean not judging. For example, we can perhaps understand the chain of causes that led to a person becoming a rapist, an abuser or even a Nazi (see Hanna Arendt). In no way does understanding translate into acceptance, or even abstention from judgment.


Do we have to accept all differences?


Is it possible, in the name of tradition, to admit all differences? No, of course not, because who decides what traditions are? Whose interests do they serve? What do they justify? Traditions, like all human customs, evolve, and if they lead to coercion, if they have negative consequences, if they are part of oppressive societies, they should not be respected either.

To sum up:

Tolerance is not a theoretical, contemplative, abstract position; it must lead to action.

A tolerant society is a mosaic whose cohesion rests on a binder that cements together the many pieces of different shapes and colors. This glue is the shared values that emerge from open, democratic discussion.


CONDITIONAL TOLERANCE

- Tolerance and relativism


Relativism is a prerequisite for tolerance. How can we tolerate beliefs and the practices that stem from them if we are convinced that only our own are well-founded, defensible and acceptable? However, relativism is not a sufficient condition. In its most radical forms, it can even fuel intolerance. Believing that everything is acceptable, even unjust, discriminatory and inhumane practices that fail to respect the dignity of every human being, can lead to destructive excesses.


Relativism postulates the equal value of cultures. Of course, no value judgement can be made on a given social practice before a serious, complete and unprejudiced analysis of the living conditions and context (social, historical, cultural, political) in which this social practice is embedded. Correctly understood, cultural relativism is defined as an openness to looking at the Other with an open mind, to putting beliefs and practices into context. This methodological relativism does not preclude judgment. It does, however, preclude any a priori judgment, prior to an open and rigorous analysis. For example, having a very good "understanding" of the explanatory factors, the socio-political context and the causes of the excesses of Nazi Germany is not enough to accept the resulting elimination of Jews, Poles, homosexuals or the mentally deficient.


Relativism rightly maintains that we cannot judge the values and practices of others from the fact that they take on their full meaning once placed in their own socio-cultural frame of reference.

For example, to what extent can we judge the practices of ancient civilizations (e.g. Sumerian, Greek, Roman) who lived in a social, political and moral universe totally foreign to the contemporary world?

It's important to respect traditions: But respecting traditions must also take into account the asymmetrical social relationships that exist within any society. All too often, it masks power relationships and injustices, and traditions are not immutable. Some traditional practices are harmful, even malevolent, while others are beneficial and others are ethically neutral.



Are there or are there not Universal Values?


Of course, the controversy will focus, as is customary today, on universal "values", considered to be Western values and therefore....colonialist!


But on closer inspection, these "values" are no different from one culture to another, one religion to another, and even one country to another. What are they? Solidarity, mutual aid, responsibility for our actions, concern for a form of justice, respect for human life, even respect for personal autonomy, are not totally absent from certain cultures, and we can consider that they are inscribed at the heart of humanity. But even "if we were to observe that equality, individual freedom or respect for dignity are not present everywhere, would these values automatically be disqualified from considering practices that flout them as intolerable? It should be remembered that adherence to the Universal Declaration of Human Rights is absolutely voluntary, and has only a declaratory value with no sanction. 190 countries have signed it!


To these "fundamental human rights" should be added, as some analysts have pointed out, "capabilities", i.e. the conditions for "everyone to have the freedom, tools and skills to pursue ends that are representative of their own conception of a satisfying life". "These competencies encompass personal competencies, of course (personality traits, intellectual or emotional skills, perceptual or movement abilities) but, just as much, access to a social, political and economic environment conducive to the expression of this freedom."


Cosmopolitanism and tolerance


The horizon towards which multiculturalism-inspired tolerance tends is no longer that of building a nation that accepts otherness while promoting a shared vision of what is good, right, just and tolerable. It becomes that of citizens of the world, all equal in their respective contribution to diversity: this is what we call cosmopolitanism. In its radical form, cosmopolitanism promotes a global political order, and presupposes the more or less complete disappearance of nation-states. Like relativism, cosmopolitanism presupposes an attitude of openness to difference, intercultural communication skills and an ideal of universal solidarity that transcends ethnocultural barriers.


But what is the purpose of tolerance? Is the cosmopolitan project the antidote to the unbridled fragmentation of identities? Should we tolerate simply to promote diversity in itself? For a radiant post-multiculturalist future, with minorities cohabiting in "purely" pluralist societies that transcend minority-majority relations? Or do we hope to see these diversities disappear one day, by encouraging these new citizens of the world to transcend the boundaries of their identities in a cosmopolitan way? Finally, does this cosmopolitanism contribute to a unifying social project based on shared humanist values?


As it happens, cosmopolitan ideals are having to contend with the reinforcement of borders and the multiplication of "walls" separating a growing number of countries. (We've never seen so many walls being built everywhere). What's more, this ideal has already been put into practice, and the result is that no universal peace has ever flowed mechanically and automatically from the overcoming of states.


Religious beliefs and tolerance


Respect for religious beliefs has always been one of the best places to put tolerance to the test.

With the exception of a tiny minority of citizens, everyone recognizes the right of everyone to believe what they want, both in the field of religion and in that of the most bizarre and fanciful secular beliefs (e.g.: horoscopes, the power of chakras and auras, extraterrestrial life forms, conspiracy theories, witchcraft, neo-shamanism). Humanity, it seems, must come to terms with the hope cultivated since the Age of Enlightenment of a population that is predominantly guided by rationality alone, the achievements of science and critical thinking. Any hindrance to the right to believe what we want cannot be justified either ethically or politically.


Believing in the existence of extraterrestrials, reincarnation, life after death, that the world was created in seven days, or that the Earth is flat, has no bearing on living together. However, the same cannot be said for the belief that vaccinations run counter to God's will and are best left to prayer, that teaching children about sexuality at school risks perverting them, that the right to abortion must be subordinated to God's will or that climate change does not exist unless it is God's will; these beliefs have serious consequences for vulnerable individuals and the community.


The right to freedom of belief guaranteed by constitutions and laws reaches its limits when it leads to the tolerance of attitudes and practices that may lead to infringements of other human rights or the protection of the planet.


We even have a duty to denounce these beliefs when they militate to impose their own standards on society as a whole. The case of the pro-life movement perfectly illustrates the seriousness of the impact of this religious "freedom"; it works not for the free choice to continue an unwanted pregnancy but rather, in a totalitarian and radical intolerance, for the abolition of the right to abortion for all women, believers or not. The right to believe cannot become the right to convert by force.


Regrettable confusion


Standard definitions of religion place beliefs and practices on an equal footing. Freedom of conscience and freedom of social practice are lazily confused, with beliefs and practices seemingly indistinguishable.


Religious beliefs cannot therefore automatically justify non-compliance with the freely and democratically shared norms of a given society. While freedom of conscience naturally goes hand in hand with the right to practice the religion of one's choice, it must exclude the right to impose one's conscience on others.


The State cannot be neutral, the State cannot wash its hands of the practices of certain beliefs that would aim, for example, to excise girls, not to send them to school, to deny them abortion and contraception if this is authorized. Postulating the neutrality of the State in matters of values implies an abdication of its ethical responsibilities.


A secular state must protect the rights of citizens as citizens, not as believers or non-believers, just as justice is a duty that goes beyond that of charitable souls alone.


We live in pluralistic societies that are fundamentally schizophrenic. On the one hand, our legal systems are based on arguments of "empirical evidence beyond reasonable doubt", our healthcare systems refuse to support healthcare practices not confirmed by science, or authorize the distribution of drugs not approved by rigorous research - in short, they are based on science and reason. On the other hand, religious beliefs, which are exempt from any verification or validation in the light of science and rationality, even if they are at the root of practices that are harmful to social cohesion and community life, are consecrated as untouchable, exempt from all logical and scientific requirements, and protected by constitutions.


Reciprocity


Does recognition of a degree of discrimination (social, religious, economic) on the part of a given minority confirm a right to non-reciprocity in tolerance?


So, conversely, if everyone is free to believe in what they wish, we can judge these beliefs as far-fetched or heretical, because as long as these judgments are not translated into action, they only come under the heading of freedom of opinion. This is sometimes referred to as the right to blasphemy.

Tolerance is an essential value in modern pluralistic societies. In view of the exactions of fascist, dictatorial or authoritarian communist regimes in the 20th century against their minorities, and the militant quest for recognition by ethnocultural communities, we can only recognize the strategic importance of this value as the cement of harmonious living together.

Conclusion:


Tolerance cannot be satisfied with abdication, neutrality, indifference, paralyzing relativism or worse, simple deference to the culture of the Other. Not everything deserves to be tolerated, especially when tolerance implies accepting encroachments on fundamental rights.


Tolerance requires freedom of belief and religious practice.


But it also involves a critique of the victimhood and indignation hysteria fuelled by well-meaning tolerance activists. Dogmatism confines them to a generalized guilt-tripping of the intolerant, a shapeless group that in fact amalgamates all those who reflect on the limits and conditions of respect for the Other. The culture of awakening and banishment that is rampant in today's world is marked by an inflation of emotions and heightened sensitivities, authorizing militant groups to adopt attitudes and practices that are downright intolerant of those accused of cultural appropriation, racism or sexism. Openness to the Other cannot be achieved without a tolerance committed to promoting values and standards that define the conditions and limits of harmonious coexistence.


We live in a world full of people who are convinced they are right. And yet, over and above the certainties asserted by some, the "courage of nuance "2 has never been so important. Today, however, it's much easier to be dogmatic than nuanced.

If we are to live together in harmony, we need to be committed to universal values based on a consensus reached after open, democratic and ethical discussion. "It is these shared universal values and their mobilization for the common good that become the true horizon of a humanism respectful of Others. The challenge will be to focus less on what sets us apart than on what we all share as human beings."


This goal can only be achieved if a project for society, guaranteeing freedom for all, and based on humanist and emancipatory tolerance, is discussed without dogmatism between all members of society, crossing community, ethnic, religious and sexual identities to place the human being at the heart of a reasonable pluralism.


Odile Grisver


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